Cet article vous est proposé par Mathilde Hubert pour le magazine Savoirs.
Frédérique Berrod, professeur spécialisé en droit de l’Union européenne à l’Institut d’études politiques (IEP) de Strasbourg et au Collège d’Europe de Bruges, membre du centre d’excellence franco-allemand Jean Monnet, fait le point sur les enjeux du Brexit pour le monde universitaire.
Les échanges Erasmus seront-ils encore possibles avec les Britanniques après le Brexit ?
Jusqu’à la sortie officielle du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE), les projets financés par le programme Erasmus continueront d’inclure le Royaume-Uni. Une fois le Brexit acté, reste à savoir comment les rapports entre les deux pays seront établis. En cas de ratification par les britanniques de l’accord de sortie (le fameux deal), il y aura maintien d’Erasmus jusqu’à la définition de la future relation du Royaume-Uni avec l’UE. En cas de no deal par contre, rien n’est garanti : Erasmus ne peut plus fonctionner, les parcours intégrés dans le cadre d’échanges universitaires devront être renégociés par accord bilatéral entre les universités et la question des frais d’inscription aux universités anglaises se verra également reposée. En effet, les étudiants de l’UE seront des étudiants étrangers au Royaume-Uni, ce qui devrait conduire à une augmentation substantielle des droits d’inscription.
Quelles conséquences sur le financement de la recherche ?
Quelles qu’en soient les conditions, la Grande-Bretagne sera considérée après ce Brexit comme un pays tiers dans les collaborations de recherche européennes et il faudra repenser les partenariats de financement puisque le Royaume-Uni n’aura plus accès à ceux de l’UE. Or, il est difficile de se passer des fonds européens aujourd’hui. Les Britanniques devront soit arrêter certains projets de recherche soit les financer autrement. Certaines universités britanniques se délocalisent dans l’UE en créant des filiales pour rester dans les programmes européens. Ainsi, UCL Research Limited, une branche de l’université la plus célèbre de Londres a récemment déménagé son siège en Irland
Face à tant d’incertitudes, comment se préparer aux différentes éventualités ?
Cette situation ne peut perdurer mais ce sont les Britanniques qui doivent se décider. Il faudrait que les universités européennes utilisent ce temps-là pour réfléchir à leurs priorités après le Brexit et revoir leurs politiques tant en formation qu’en recherche. Quels sont les intérêts des partenariats bilatéraux avec les Britanniques ? Si des partenariats en formation ne reposent que sur l’apprentissage de la langue anglaise par exemple, alors il faut explorer les alternatives qui existent dans d’autres Etats de l’UE. Et il faut préparer nos étudiants à partir sous des conditions susceptibles d’évoluer dans le temps. Dans tous les cas, cela reste des problématiques du droit auxquelles il existe toujours des solutions !
Le contexte
Les négociateurs de l’UE et du Royaume-Uni se sont entendus le 25 novembre 2018 sur un projet d’accord de retrait. Cet accord doit être ratifié par les parlements britannique et européen. Malgré le résultat négatif des votes du 15 janvier, du 12 mars et du 11 avril 2019 à la Chambre des Communes, l’accord pourrait à nouveau être soumis au Parlement britannique.